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Mai 2014-Mai 2016 : deux ans déjà depuis les élections fédérales

Mai 2014-Mai 2016 : deux ans déjà depuis les élections fédérales © M. Detiffe

Vingt mois complets que le gouvernement fédéral dit "la Suédoise" est en place. Pour rappel, certains avaient qualifié cette coalition de "kamikaze". Une chose est certaine aujourd’hui, c’est bien pour l’ensemble de la société que ce gouvernement agit en kamikaze. Les mesures prises ces derniers mois ne génèrent rien d’autre que la déconstruction brique par brique des acquis sociaux des décennies passées.


Le tour d'horizon des mesures prises récemment par le gouvernement fédéral se révèle particulièrement inquiétant. Citons-en quelques-unes.

Pour les malades de longue durée

De près ou de loin, tout le monde connait quelqu’un qui fait face à une maladie de longue durée, qui a dû interrompre son travail plusieurs mois, qui – dit-on couramment – "dépend de la mutuelle", qui, en fait, fondamentalement, bénéficie du système de sécurité sociale. Pas facile après plusieurs mois d’absence de s’insérer à nouveau dans une vie professionnelle. Compliqué de reprendre le fil des dossiers, des évènements, des réalités du boulot…

Il est une évidence que notre société doit tout mettre en œuvre en vue d'offrir à ces personnes en "arrêt maladie" de longue durée, les meilleures conditions possibles pour un retour à l’emploi. Un récent accord entre partenaires sociaux prévoyait la possibilité d'accompagner un retour volontaire au travail de ces malades de longue durée.

Mais qu'a décidé le gouvernement ? Il a imaginé que des sanctions financières seraient salutaires… Et comment compte-t-il les appliquer ? Sans doute en amputant le budget alloué pour garantir aux invalides un revenu… Est-ce vraiment par cet angle de vue uniquement budgétaire que nous voulons être gouvernés ?

Pour les prisons et la justice exsangues

Dans un tout autre registre, la grève de ces derniers jours dans les prisons du pays montre, une fois de plus, le peu de place qu’accorde le gouvernement fédéral à l’humain. À en croire le célèbre écrivain russe Dostoïevski, on peut prendre la mesure du degré de civilisation d’une société à la manière dont elle traite ses prisonniers.

Que penser alors de la Belgique à l’heure actuelle ? La Justice et l’Intérieur qui comptent parmi les fonctions clés d’un État sont désinvesties par notre gouvernement, exception faite des mesures d’urgence de ces derniers mois. Des investissements structurels et une vision à long terme manquent en ces matières. Comment nous contenter d'un appareil judiciaire en manque de moyens qui, de facto, fait des erreurs ? Comment accepter encore que des centaines de personnes incarcérées ou qui les encadrent souffrent du choix des investissements d’un gouvernement ? Certes les prisonniers prestent une peine eu égard à leurs délits, faut-il les considérer pour autant comme des sous-hommes ? Méritent-ils moins d’égards que les nantis ? Et aux centaines de travailleurs de ces secteurs…, quel message le gouvernement est-il en train d'envoyer ?

Au bout du compte, les moins nantis sont les plus touchés par les mesures du gouvernement, et les plus riches les plus protégés.

Un budget de plus en plus serré

Parmi les mesures récentes, pointons enfin le budget. Ce sacro-saint budget ! Le gouvernement fédéral avait annoncé des mesures fortes en la matière, communiquant largement autour d'un fameux "tax shift". Au sein du Mouvement ouvrier chrétien (MOC) et en tant qu'organisation constitutive, la Mutualité chrétienne avait à l'époque déjà réagi : "Le tax shift élaboré par le gouvernement Michel n’organise malheureusement pas une plus grande justice fiscale. Il se caractérise par un transfert de moyens de la sécurité sociale et des consommateurs vers les entreprises et un groupe ciblé de travailleurs".

Cela se confirme aujourd'hui. Le gouvernement ne cesse de courir derrière de nouvelles économies à faire… Et ce sont les branches de la sécurité sociale qui en pâtissent le plus : les pensions, les soins de santé, le chômage…

Au bout du compte, les moins nantis sont les plus touchés par les mesures du gouvernement, et les plus riches les plus protégés. La dualisation de notre société se voit renforcée… Ceux qui joignent difficilement les deux bouts sont précarisés davantage, au gré des décisions politiques telles que le saut d’index, la réduction des assimilations pour la pension, la taxe sur l’énergie, etc. Par ailleurs, est-il encore besoin de rappeler à quel point la situation socio-économique de chacun influence son état de santé… ?

Et pourtant…

Pourtant, il existe une série de mesures qui seraient réellement re-distributrices et solidaires. Une véritable taxe sur les plus-values boursières, par exemple, mobiliserait des moyens importants. Pourquoi aussi ne pas mettre fin aux intérêts notionnels dont bénéficient certaines entreprises et qui leur permettent d’éluder l’impôt ? Pourquoi ne pas créer une réelle taxe sur la spéculation et faire des choix d’investissements sociétaux ? Pourquoi ne pas lutter davantage et plus efficacement contre les fraudes fiscale et sociale…?

Alors, que faire ? Continuer à dénoncer, critiquer, élaborer des propositions alternatives, se mobiliser largement pour faire percoler des messages forts de solidarité et de défense de notre sécurité sociale. La mobilisation, chacun peut y participer, à son niveau, au départ de sa réalité et se battre pour une société encore meilleure demain… Chaque jour, il nous faut construire davantage de liens sociaux. Ils sont essentiels dans une société où le pouvoir semble rendu à l’argent, aux politiques néolibérales et à l'économie de marché qui les choient.