Bien être

Ça balance pas mal au printemps...          

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Valentine De Muylder

Valentine De Muylder

Chaque année, au sortir de l’hiver, nous sommes nombreux à succomber à la frénésie du nettoyage et du rangement. La saison des brocantes est aussi celle où les magasins de seconde main font le plein. L’asbl Les Petits Riens nous le confirme : chaque année, les vacances de Pâques sont une période où les dons en nature affluent. De quoi faire tourner la roue de l’économie circulaire tout en libérant de l’espace chez soi… et en soi.
Car ces dernières années, dans le sillage de la célèbre autrice japonaise Marie Kondo et de sa méthode KonMari (La Magie du Rangement, 2011), les techniques de rangement fleurissent comme cerisiers au printemps et se présentent comme de véritables ressources de développement personnel. Une petite recherche en ligne vous le prouvera : les home organisers sont de plus nombreux – ou plutôt nombreuses, parce que toutes celles que nous avons trouvées étaient des femmes – à proposer leurs services en Belgique.

Prévenir l’épuisement parental
Avoir de l’ordre, ce serait d’abord se simplifier la vie au quotidien, notamment en famille. "Lorsque les choses sont ordonnées, on perd moins de temps à les chercher, et c’est du temps que l’on peut s’octroyer à soi-même ou à son enfant", confirme Nathalie Velu, psychologue et coach, qui organise les Ateliers des parents de la Ligue des familles. Le désordre fait d’ailleurs partie des facteurs à haut risque du risque de burn-out parental, selon cette spécialiste : "Un cercle vicieux peut s’installer. Quand on est en manque d’énergie, on va avoir moins le courage de ranger, mais le désordre va à son tour engendrer du découragement et de la fatigue. Je dis souvent que l’ordre amène l’ordre, et que le désordre amène le désordre."

De nombreuses étapes de la vie se prêtent au tri et à l’allègement.

Mais le rangement ne prend-il pas trop de temps et d’énergie lorsque l’on a des enfants et que tout est sans cesse à recommencer ? Marie Kondo elle-même n’a-t-elle pas avoué récemment que sa maison était "en bazar" (on demande à voir !) depuis la naissance de son troisième enfant ? "Jusqu'à présent, j'étais une professionnelle du rangement, et je faisais de mon mieux pour que ma maison soit toujours bien rangée, a-t-elle confié lors de la promotion de son dernier livre en janvier 2023. J'ai en quelque sorte renoncé à cela. Maintenant, je réalise que ce qui est important pour moi, c'est d'apprécier de passer du temps avec mes enfants."

À tester : le hall d’entrée apaisé
"Il y a toute une série d’astuces très pratiques qui peuvent être mises en place et qui permettent que l’ordre perdure et que les enfants rangent plus spontanément", rassure Nathalie Velu. Car le désordre peut aussi être source de tensions entre les parents et les enfants lorsque ces derniers refusent de coopérer. Un exemple ? Le hall d’entrée, lieu où l’on passe plusieurs fois par jour dans des moments critiques, en étant parfois pressés. "Globalement, dans nos maisons, nous avons trop. La toute première chose va donc être de vider le hall d’entrée pour qu’il n’y ait pas plus d’objets que d’espace de rangement et pour se limiter aux choses que l’on utilise vraiment au quotidien." On retire donc tout ce qui est hors saison et on évite les doublons pour que l’enfant (ou l’adulte !) ne soit pas tenté de choisir, chaque matin, celle qu’il préfère entre deux vestes ou deux paires de chaussures. "La deuxième étape va être de faire en sorte que chaque chose ait sa place. Concrètement, chaque membre de la famille a son espace dédié bien délimité. Un couvercle retourné étiqueté accueille volontiers une petite paire de souliers. Cela responsabilise et permet de réaccéder au plaisir et à la facilité de ranger."
Gare à la pression toutefois, avertit la psychologue. "Quand il y a vraiment de l’épuisement, ou une période de grande fragilité, quand les enfants demandent énormément d’attention, parfois la priorité n’est pas de ranger. Cela dépend d’une période ou d’une personne à l’autre." Car nous ne sommes pas égaux face à l’ordre : "Nous n’avons pas tous la même tolérance. Pour certaines personnes, le fait d’avoir moins d’objets dans son champ de vision peut apporter un véritable apaisement sensoriel." Nathalie Velu propose donc de se poser la question, dans les périodes compliquées : est-ce que c’est vraiment une priorité pour moi que ce soit rangé ? Si c’est le cas, elle encourage à faire appel à du support externe : aide-ménagère, aide familiale ou aide ponctuelle de l’entourage. "Parfois, il suffit de trente minutes pour que le cercle vertueux de l’ordre soit relancé."

"Le début d’une nouvelle vie"
Le rangement ne profite pas seulement aux familles avec de jeunes enfants. De nombreuses étapes de la vie se prêtent au tri et à l’allègement. Delphine Gilain, home organiser, s’est spécialisée dans l’accompagnement des personnes âgées qui quittent leur maison ou leur appartement pour un logement plus adapté. "J’ai commencé par aider la maman d’une amie, qui avait choisi d’aller vivre en maison de repos, raconte-t-elle. Elle se retrouvait avec un appartement à vider, toute une vie à trier, et elle n’avait envie de faire cela avec ses enfants. Elle préférait faire appel à quelqu’un d’extérieur au cercle familial, qui reste tout à fait neutre."

Ranger, trier ou désencombrer ne signifie pas nécessairement jeter !

"J’ai pris énormément de plaisir à travailler avec elle", continue cette professionnelle du rangement qui propose désormais un service adapté aux seniors. Un travail découpé en plus petites journées, qu’elle tient à enrober d’un climat positif : "Je dis toujours que ce n’est pas la fin de quelque chose, c’est le début d’une nouvelle vie." Après une première rencontre permettant de faire connaissance et d’établir un plan d’action, Delphine Gilain s’attaque au rangement avec ses clients. "Tout dépend de leur objectif, précise-t-elle. Si une personne part s’installer dans une maison de repos, on sera vraiment dans le minimalisme. On va commencer par constituer un trousseau, avec l’essentiel, avant d’y ajouter quelques meubles et objets." D’autres personnes souhaitent simplement se désencombrer afin d’anticiper la tâche future de leurs proches, ou encore faciliter l’accès aux objets et la circulation dans leur maison. 

Trier n’est pas jeter
Mais ranger, trier, désencombrer ne signifie pas nécessairement jeter : "Petit à petit, on essaye de trouver des destinations aux choses qu’on ne va pas garder. Il y a un objectif de recyclage et de valorisation de ces objets que les gens ont gardé précieusement pendant longtemps." Pour ce faire, la spécialiste suggère une démarche conviviale : "Une fois qu’on a sélectionné ce qu’on était sûr de ne pas garder, on organise un apéro avec les amis et la famille. Est-ce qu’un de vos petits-enfants serait intéressé par votre collection de vinyles ? On va faire un carton à son nom. Et puis on ouvre le cercle. On propose aux voisins, aux associations, aux crèches, aux écoles… Si le temps et la santé de mes clients le permettent, j’aime qu’ils m’accompagnent pour offrir les dons et recevoir eux-mêmes les sourires et les mercis."
Comme Nathalie Velu le faisait pour les parents, Delphine Gilain constate un impact important du rangement sur le bien-être de ses clients : "C’est fou l’impact que cela a sur la charge mentale. Certaines personnes me confient qu’elles se sentent plus légères, que tout est plus simple. D’autres me disent : 'Maintenant je prends du plaisir à être chez moi, ou à inviter mes copines à prendre un café, je ne suis plus gênée de mon intérieur'."

>> Pour en savoir plus sur l’atelier "L’organisation familiale et de la maison : essentielle à la prévention de l’épuisement parental" proposé par Nathalie Velu, et sur les autres "Ateliers des parents" de la Ligue des Familles, rendez-vous ici.
À la recherche de lieux où donner les objets et matériaux dont vous souhaitez vous séparer ? Le site de la Fédération des entreprises sociales et circulaires rassemble de nombreuses infos pratiques au sujet de ses 74 membres actifs à Bruxelles et en Wallonie.