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L'humain au cœur des droits du patient         

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Alexandre Verhamme, directeur général de la MC

Alexandre Verhamme, directeur général de la MC

Ce 18 avril était consacrée à la journée européenne du droit des patients. Un sujet qui vit tous les jours au sein de la MC. En 2022, la loi sur les droits du patient célébrait ses 20 ans d'existence. Cette loi consacre notamment les droits du patient à bénéficier de soins de qualité, à choisir qui le soigne, à être correctement informé pour pouvoir donner un consentement libre et éclairé, etc; Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, en 2002, le paysage des soins a évolué par bien des aspects. "Le projet s’inscrit dans une vision moderne des soins de santé, selon laquelle les prestataires de soins doivent prendre les souhaits et attentes de leurs patients en compte dans le choix du traitement ou d’un examen : c’est aussi un droit du patient", commente le ministre fédéral de la Santé, Franck Vandenbroucke.

Respecter les droits du patient, c'est aussi respecter son projet de vie et ses objectifs.

La loi actuelle sur les droits du patient met l'accent sur la relation individuelle entre le prestataire de soins et le patient, alors qu'aujourd'hui il s'agit de travail d'équipe, de coopération entre tous les prestataires de soins autour du patient et avec le patient lui-même et ses proches. De nouveaux enjeux et de défis se voient aussi le jour et sont à prendre en compte : le vieillissement de la population, la santé mentale, l’évolution des pratiques, la pénurie de soignants, l'accès financier aux soins de santé, la numérisation (Lire aussi "La digitalisation favorise-t-elle le droit des patients ?"), la technologisation croissante, la nécessité de renforcer la capacité des patients de dire et d’agir (empowerment), etc. 

 

Pour le patient, avec le patient, par le patient

Jusqu'au 17 avril, les citoyens comme les acteurs de la santé étaient invités à réagir à l’avant-projet de de loi. La proposition présentée lors des auditions en Commission de la Santé publique de la Chambre des représentants rencontre sur de nombreux point notre vision des soins. La santé y est prise au sens large. Respecter les droits du patient, c'est aussi respecter son projet de vie et ses objectifs, qu'ils soient d'ordre professionnel, familial, social, philosophique, etc. Le concept de soins intentionnels, qui va bien au-delà du consentement éclairé, aura désormais une place claire dans la loi. 

La planification anticipée des soins est une démarche qui nécessite de l'échange et doit pouvoir évoluer tout au long de la vie.

Autre point positif, c'est l'attention qui est accordée à la planification anticipée des soins ainsi que la volonté de clarifier le rôle de la personne de confiance. Quels soins souhaiteriez-vous en cas de maladie soudaine, d’accident grave ou d’urgence ? Que faire si vous ne pouvez plus communiquer vos souhaits dans de telles situations ? Qui prendrait les décisions pour vous ? Depuis plusieurs années, la MC met en œuvre des actions pour briser le tabou qui peut entourer ces questions. Des séances d'informations sont régulièrement organisées par la MC, ainsi que des ateliers autour du jeu de cartes "Mes souhaits de vie". Les volontaires d’Énéo ont également réalisé un outil, le carnet de vie, qui accompagne les ainés dans les démarches administratives et légales dans les domaines les concernant et qui favorise la réflexion personnelle sur leurs valeurs et ce qu'ils souhaitent transmettre. Au-delà de permettre aux patients de poser ses souhaits pour demain, la planification anticipée des soins est un véritable changement de paradigme qui rétablit l'équilibre entre le médecin, le patient tout en faisant une place à l'aidant. Mais attention toutefois à ne pas en faire un sujet figé sur le papier. La planification ne peut se limiter à remplir des déclarations administratives en ligne, comme c'est le cas dans cette première version du texte. C'est une démarche qui nécessite un accompagnement, de l'échange et doit pouvoir évoluer tout au long de la vie. Il s'agit d'un processus dans lequel la réflexion et la discussion sont des éléments tout aussi importants, voire plus importants, que l'écriture. Sans parler du piège de la fracture numérique. 

Le projet de renforcer la loi sur le droit du patient va indubitablement dans le bon sens. Mais le diable peut se cacher dans les détails. Pour prendre un exemple, le projet prévoit une plus grande transparence sur le curriculum des prestataires. Mais cette disposition a-t-elle la moindre chance d'aboutir si demain le patient doit poser la question directement à son médecin ? La loi prévoira-t-elle une obligation de publier ces informations sur un site ou un registre de transparence ?

Tout l'enjeu de ce beau projet sera de bien penser les mécanismes de mise en œuvre sur le terrain, les processus d'évaluation et les politiques pour l'accompagner.