Editos

Un droit est un droit

3 min.
Alexandre Verhamme

Alexandre Verhamme

Depuis le 1er février, les bénéficiaires de l’intervention majorée (1) profitent d’un tarif social plus avantageux pour le gaz et l’électricité. Mais cette mesure, prise dans le contexte de la crise sanitaire, risque de prendre fin prochainement, même si Tinne Van der Straeren, la ministre fédérale de l’Énergie, envisage une prolongation. La MC plaide vivement en ce sens. Dans un contexte où la flambée des prix aggrave la précarité énergétique, nous appuyons toutes les mesures qui permettent aux plus fragiles de ne pas voir leur santé se dégrader davantage. La facture d’énergie peut pousser certaines familles à moins se chauffer ou faire des économies qui se répercuteront sur leur santé. Si l’application du tarif énergie est, en théorie, automatique, la MC remarque toutefois que son application concrète est encore loin d’être optimale. Pour ouvrir le tarif réduit au BIM, les fournisseurs d’énergie sont obligés de croiser les données avec la Banque-Carrefour. Mais lorsque les informations personnelles n’ont pas été parfaitement encodées par le client, des personnes passent entre les mailles du filet. Elles doivent alors recourir, de leur propre chef, aux services des mutuelles pour obtenir une attestation. Ce qui présuppose avoir connaissance de ce droit… Pour la MC, une solution simple comme systématiser l’utilisation du numéro de registre national sur les contrats d’énergie permettrait de garantir cette réduction de façon automatique.   

Au-delà de la facture d’énergie

Cette actualité met en lumière des enjeux cruciaux en termes de protection sociale. Au-delà de la facture d’énergie, la question du tarif social pose celle, plus vaste, de l’automatisation des droits. La sécurité sociale a mis en place des mécanismes parfois (trop) complexes qui permettent, entre autres, de soutenir des personnes fragilisées ou d’envisager plus sereinement certaines étapes de vie : soins de santé, revenus de remplacement, allocations familiales, pensions, etc. Pour les personnes qui remplissent les conditions requises, l’informatisation des données doit être mise à profit pour ouvrir ces droits de façon automatique, sans que les bénéficiaires n’aient à accomplir de démarches spécifiques, comme c’est déjà le cas pour , par exemple, une grande partie des bénéficiaires du Maximum à facturer (2) ou pour l’obtention du statut BIM (3).   

Dans une vision moderne et engagée de la solidarité, l’automatisation des droits ne devrait pas être un combat. Comme le revendiquait déjà la MC dans son mémorandum pour les élections, un droit est un droit et si on peut l’activer "vite et bien", nous devons éviter que des délais d’attente renforcent une précarité naissante ou plus grave et que certains passent tout bonnement à côté... Constater qu’un droit doit encore être demandé à l’époque ou des outils digitaux se targuent même de penser à notre place est interpellant. Les chiffres, faut-il le rappeler, démontrent que les personnes les plus concernées par ces droits sont aussi celles qui ont le moins de capacité d’information ou d’accès à celle-ci. 

L’automatisation des droits a toutefois ses limites. L’interconnexion des données ne doit pas inciter à la mise en place de systèmes de type Big data dont on perdrait le contrôle. Au-delà des enjeux en termes de protection de la vie privée, il serait aussi illusoire de croire qu’une question aussi fondamentale que l’accès aux droits puisse se résoudre grâce à la seule digitalisation.  

Les différents acteurs au contact du public, dont les mutualités, ont la responsabilité d’accompagner les bénéficiaires au-delà de leur demande initiale pour s’assurer proactivement que tous les droits ouverts aient pu l’être. En tant qu’assureur social, la visionglobale, à 360 degrés, que nous avons des situations individuelles de nos membres nous permet de construire une démarche pour activer d’autres mécanismes, d’autres dispositifs, d’autres aides. En tant que mouvement social et entrepreneur social, notre mission, au-delà des aspects financiers évidemment essentiels, est aussi d’offrir des conseils et des services qui s’inscrivent dans une vision de la santé au sens large. 

Réjouissons-nous des avancées possibles à propos de l’efficacité de l’ouverture automatique des droits et poursuivons notre engagement d’universalisme pour offrir des conseils et un service complet pour tous !