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Évitons que le prix des soins ne s'envole

Évitons que le prix des soins ne s'envole © M. Detiffe

Tous les ans ou les deux ans, médecins, kinésithérapeutes, dentistes, logopèdes…fixent avec les mutualités un cadre pour les honoraires et les remboursements de soins. Le contexte budgétaire très serré a parfois rendu ce dialogue difficile. Ainsi, depuis le 1er janvier, l'incertitude domine dans certains secteurs pour 2017. Mais grâce à l'engagement et aux efforts de tous les partenaires – prestataires de soins, mutualités, Inami et gouvernement fédéral – nous pouvons espérer rétablir rapidement la sécurité tarifaire pour les patients chez les kinés et les médecins.


Les choix budgétaires du gouvernement fédéral se sont traduits par des économies substantielles dans les soins de santé. Des budgets déjà très étroits et des mesures d'économies linéaires supplémentaires – la masse globale d'indexation a été fortement réduite – ont rendu les discussions très difficiles entre les représentants des mutualités et des soignants. Il n'existe en effet pas de marges pour revaloriser certains soins ni même tout simplement les indexer. Comment alors motiver les prestataires à signer un accord et les engager à respecter des tarifs officiels ? L'enjeu est fondamental : peut-on continuer à parler d'assurance soins de santé obligatoire si les patients n'ont plus aucune garantie d'être soignés au tarif de la convention ?

Un contexte budgétaire très, trop étroit

Nous l'avons déjà dénoncé : le budget alloué aux soins de santé pour 2017 est trop étroit. La croissance réelle a été réduite à 0,5 % ! Pour y parvenir, le gouvernement fédéral a imposé plus de 900 millions d'euros d'économies aux soins de santé. Et les perspectives ne s'annoncent pas meilleures pour les années à venir. D'une part, la croissance économique du pays reste faible. D'autre part, la réforme du financement de la sécurité sociale voulue par le gouvernement fédéral risque d'entraîner celle-ci vers un grave déficit structurel. Comme les réductions des cotisations sociales accordées ne sont pas compensées par d'autres recettes, ce sont de nouvelles économies qui seront encore imposées en sécurité sociale.

Alors que jusqu'ici, le secteur des soins de santé était encore plus ou moins préservé des impacts de la crise, nous entrons dans une période de vaches maigres. Les mauvaises perspectives budgétaires atteignent tout le secteur des soins de santé. Et sans marge budgétaire supplémentaire, il n'y aura pas de place pour de nouvelles initiatives ou des revalorisations. Nous serons contraints, dès lors, d'opérer des choix à l'intérieur des enveloppes, de supprimer ou réduire certaines interventions pour en revaloriser ou en introduire d'autres. Un exercice difficile et des choix cornéliens nous attendent !

Des engagements pour des réformes structurelles

Ce contexte budgétaire impose aussi de revoir l'approche qui préside à la conclusion d'accords et de conventions avec les prestataires de soins. S'accorder uniquement sur une hausse des tarifs n'est plus réaliste. Ainsi, lors des négociations engagées en vue de conclure une convention en kinésithérapie pour 2017, les organismes assureurs ont proposé aux représentants des kinésithérapeutes de s'engager ensemble à mieux contrôler le volume des prestations, à encadrer les pratiques, à simplifier les procédures administratives et à lutter contre les abus. Autres propositions : aligner les traitements sur les besoins en fonction des pathologies et définir l'offre nécessaire en kinésithérapie. L'ensemble de ces mesures structurelles devrait, à terme, permettre de dégager des marges pour revaloriser les tarifs.

De même, les négociations entre mutualités et représentants des médecins ont pu être relancées grâce à des engagements structurels acceptés par le gouvernement. Ces engagements offrent des perspectives plus qualitatives pour le corps médical (financement stable des postes de garde de médecine générale, réforme de la nomenclature, mesures transitoires dans la digitalisation…). La maîtrise des volumes et la réduction de prestations injustifiées devraient aussi permettre de dégager des moyens nouveaux et d'assurer la stabilité budgétaire demandée par les prestataires.

Appel pour garantir la sécurité tarifaire Ces engagements structurels offrent de nouvelles perspectives, même dans le carcan budgétaire qui est imposé. C'est pourquoi le Comité de l'assurance de l'Inami – qui réunit des représentants des organismes assureurs et des prestataires de soins – a estimé, à une très large majorité, que le nouveau projet de convention pour 2017 peut être présenté à chaque kinésithérapeute. Si plus de 60 % des kinés y adhèrent, la sécurité tarifaire pour les patients sera rétablie et chaque kinésithérapeute conventionné bénéficiera dès lors du statut social (intervention de l'État pour la pension), d'une prime informatique et, pour certains, d'une prime de qualité.

En ce qui concerne les médecins, étant donné que le gouvernement s'engage à répondre aux demandes d'adaptation structurelle, les organisations syndicales de médecins appellent généralistes et spécialistes à respecter les tarifs en vigueur depuis le 1er janvier 2017. Fin mars, si les engagements se concrétisent, un nouvel accord pourrait être signé pour 2017, rétablissant ainsi la sécurité tarifaire pour les patients et ouvrant aux médecins conventionnés le droit au statut social pour 2017.

La sécurité tarifaire pour les patients est la clé de voûte de notre système d'assurance soins de santé obligatoire. Sans elle, c'est la porte ouverte aux suppléments et aux honoraires élevés, à la marchandisation des soins. Nous espérons que l'appel au respect des tarifs chez les médecins et au conventionnement chez les kinésithérapeutes sera entendu et suivi.