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Volontariat, reconnaissons l'engagement

Volontariat, reconnaissons l'engagement © M. Detiffe

Dans les hôpitaux, les clubs de sport, les écoles de devoirs, les instances d'un florilège d'associations..., des volontaires – par milliers - participent au dynamisme de nombre de projets collectifs. Ils sont le terreau d'initiatives citoyennes en tout genre. Avec la journée du volontariat fixée au 5 décembre, ils sont mis à l'honneur ; tandis que ceux qui nous gouvernent entament des débats à propos de leur statut.


La reconnaissance du travail volontaire, de ses apports à notre vivre-ensemble est fondamentale. Les journées dédicacées servent sans doute à cela : mettre en avant. Peut-être en estil de même de la réflexion législative sur le statut des volontaires : reconnaître leurs rôles. Cependant, la perspective des récents projets gouvernementaux visant certaines activités volontaires n'est pas sans risque.

Volontaire à part entière

Depuis 2005, une loi encadre le volontariat. Elle détermine les droits et devoirs des bénévoles ainsi que les obligations des organisations qui les accueillent. Elle identifie avec précisions les activités que peut exercer un volontaire. Elle précise des aspects tels que la possibilité d'un défraiement non imposable (avec un plafond de 1.400 euros annuel), etc. Sur ce point, le législateur n'a pas cherché à trouver une manière de rémunérer les bénévoles. Son intention en édictant des règles précises était tournée davantage vers l'attention à ce que l'engagement volontaire n'engendre pas de coûts à celui qui l'endosse. Le défraiement forfaitaire prévu vise donc à rembourser sans surcharge administrative certains frais – téléphoniques par exemple. Objectif ? Favoriser l’engagement citoyen.

Il y a une bonne année maintenant, le Conseil supérieur des volontaires (CSV) – qui se compose d'organisations concernées par le volontariat, dont la Mutualité chrétienne – évaluait la mise en oeuvre de cette loi sur le volontariat. Dans un avis remis à la ministre fédérale des Affaires sociales, Maggie De Block, il demande une modification du texte de loi, afin de le préciser (1). Dans la foulée, le Conseil s'est aussi penché sur certaines fonctions exercées par les volontaires : entraineur dans un club sportif, arbitre lors de rencontres sportives, aidants tiers… Aux yeux du Conseil, la loi sur le volontariat n’est pas du tout adaptée à ces divers engagements ; un statut spécifique devrait les distinguer des bénévoles et permettre une rémunération de leurs services.

Et tout à coup…

Cet avis a inspiré et mobilisé le gouvernement fédéral. Celui-ci s'est mis au travail autour de l'élaboration d'un statut adapté à ces fonctions, sorte de mixte entre le statut du volontaire et celui de l’employé. Les experts le nomment le statut "semi-agoral". Le secteur associatif aurait souhaité être concerté et le Conseil supérieur du volontariat associé aux travaux. Ce n'est pas vraiment le cas. Voici quelques jours, le gouvernement a fait part de sa proposition d'instituer ce nouveau statut de travail associatif. Il concernerait les engagements cités ci-dessus mais également la garde d’enfants malades, les services entre voisins et ceux qui relèvent de l’économie de plateforme tel Air BnB… Pour ces activités, un montant de 1.000 euros par mois (max 6.000/an) pourrait être perçu par les prestataires, sans taxation. Une condition pour eux : exercer une autre activité à titre principale, selon un régime de travail à temps plein ou minimum à 4/5 temps, d’indépendant à titre principal ou être pensionné. Le gouvernement élargit la notion de travail volontaire. Il s'éloigne fortement de l'avis du Conseil supérieur des volontaires.

Des risques de dévoiement

La MC voit plusieurs dangers dans le projet gouvernemental autour de ce futur statut mixte. Notamment avec l'absence de taxation et donc de participation au financement de la sécurité sociale, ces activités et leur mode de rémunération étant exempt de toute cotisation sociale. Plusieurs questions se posent : ce type de statut n'incitera-t'il pas le travailleur à diminuer le temps de travail salarié (4/5 temps) pour préférer un défraiement non imposé pour services rendus ? Comment seront contrôlés les montants perçus en dehors de tout contrat ? N'assistera-t-on pas à un dévoiement de l'engagement volontaire ? Ne verra-t-on pas émerger plusieurs degrés de volontariat dont le "coût" pour les projets sera fonction du volontaire, et de la capacité de financement de l'association qui recoure à ses services ?

Il s'agit pour le gouvernement de poursuivre sa réflexion. Le Conseil supérieur doit y être associé pour veiller au déploiement d'une culture de solidarité sans idée de marchandisation des services accordés. Dans cette perspective, la vigilance est de mise pour que le dispositif "semi-agoral" envisagé se marque dans une différence nette entre ce nouveau statut et celui du volontariat. Et ce, sans confusion aucune pour les bénévoles, pour les organisations et pour le grand public. Le tout en ne contraignant pas l'engagement volontaire par des mécanismes de contrôle étouffants. Car il reste certainement un souffle essentiel à notre vie en société.