Médicaments

Le pharma, généreux avec le milieu médical       

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(c)BELPRESS
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Joëlle Delvaux

Joëlle Delvaux

Depuis 2017, toutes les firmes pharmaceutiques sont tenues de déclarer les financements qu'elles octroient aux acteurs des soins de santé en Belgique. Une obligation de transparence qui doit permettre au patient de vérifier s'il existe un lien d'influence entre son médecin et la firme produisant les médicaments qu'il lui prescrit. Une initiative louable, certes. Mais la plateforme betransparent.be qui héberge les précieuses données est tout sauf accessible et exploitable. L'outil limite les capacités de recherches et de comparaisons, les intitulés sont flous, des noms de sociétés sont utilisés en lieu et place de médecins, etc. Dans ces conditions, impossible d'y voir clair. Mais faut-il s'en étonner alors que l'on a affaire à une initiative d'autorégulation du secteur et que les autorités publiques n'ont effectué aucun contrôle depuis la mise en ligne du registre ?
Quatre médias ont décidé de faire le boulot de l'administration. Avec le soutien de l'association EursForDocs et du Fonds pour le journalisme, ils ont analysé et croisé les 134.000 transactions que contient le registre, et interviewé 180 personnes. Nom de code de l’opération : "Open Pharma".
Fin avril, les journalistes ont commencé à distiller les résultats et révélations de leur enquête. On apprend par exemple que le groupe suisse Roche est de loin la firme la plus généreuse, avec plus de 93 millions d'euros distribués auprès du monde médical, suivi par le groupe américain MSD et la société Janssen-Cilag (Johnson&Johnson). On apprend aussi que les spécialités les plus financées sont la rhumatologie, suivie de l'oncologie et de la chirurgie orthopédique. Par ailleurs, près de 60% de l'argent déboursé par le pharma finance "la recherche et le développement", sans qu'on ne sache exactement quels sont les bénéficiaires de cette manne financière. Quant aux autres financements, ils vont aux "frais relatifs aux manifestations scientifiques" (16 %), aux "donations et subventions" (hôpitaux, lobbys européens de patients, associations professionnelles…) (15%) et aux "honoraires de consultance et frais de voyage" octroyés à des prestataires de soins (9%).
En dépit des nombreuses failles qui caractérisent le registre, Open pharma a pu mettre le doigt sur une série de pratiques qui interrogent plus que jamais le pouvoir d'influence du Big pharma sur les professionnels de la santé.