Soins de santé

Appareils auditifs : la MC veut plus de transparence        

3 min.
(c)AdobeStock
(c)AdobeStock
Julien Marteleur

Julien Marteleur

À l’échelle internationale, plus de la moitié des personnes âgées de 61 à 70 ans, et plus de 80% des plus de 70 ans, souffrent d'un déficit auditif d'intensité variable. Sur base des données 2019 de ses membres, la MC constate que 16% d'entre eux ayant été remboursé par l’assurance obligatoire pour l’achat d’un appareil auditif avaient moins de 60 ans et 40% avaient entre 61 et 80 ans. La problématique de l’audition concerne donc un grand nombre de personnes, et pas uniquement les personnes très âgées.
Le secteur des appareils auditifs connait d'ailleurs une croissance rapide : il a presque doublé en 10 ans pour ce qui est des montants remboursés entre 2010 et 2019, passant de 20 à 36 millions d’euros. Quant aux suppléments, ils ont plus que doublé, passant de 25 à plus de 50 millions d’euros. a déficience auditive affecte la qualité de vie, et notamment l'apprentissage, l'emploi et la vie sociale. Les personnes malentendantes ont un grand risque d'isolement social ou de de solitude, un risque accru d'épuisement professionnel, de dépression et même de démence, relève les chercheurs de la MC. Une bonne prothèse auditive devrait donc être un droit fondamental pour ceux qui en ont besoin.

Le patient trinque
Pour la personne qui en a besoin, le prix des appareils auditifs représente une part significative de son budget. Les Belges ne sont en général remboursés que pour moins de la moitié du prix qu’ils ont payé pour ce genre d’appareil, alors que déjà en 2008, le taux de remboursement avait été augmenté linéairement de 22%. La même année, le Centre fédéral d'expertise des soins de Santé (KCE) constatait dans une étude que pour plus de 85% des appareils auditifs les Belges payaient plus que leurs voisins européens. Au Danemark, sur 10 produits comparables, 9 étaient plus chers en Belgique (de 61% à 125% plus cher !). Il existe d'ailleurs une grande différence entre les deux pays dans le pourcentage de malentendants ayant besoin d’une aide auditive et ceux qui en possèdent une : 30% chez nous, contre 53% au Danemark.
"Les montants à charge du patient sont si importants dans notre pays quils excluent une partie des patients, dénonce Elisabeth Degryse, Vice-présidente de la MC. Surtout que ces coûts se répètent tous les 5 ans, période après laquelle il est généralement recommandé de changer d’appareil et qui correspond à un nouveau remboursement de l’assurance obligatoire. D’ailleurs, nous constatons que nos membres bénéficiaires de l’intervention majorée (BIM) achètent ou se font conseiller des appareils auditifs moins chers - moins sophistiqués - que les non-BIM et retardent l’achat d’un appareil auditif. De tels montants de suppléments sont constitutifs d’inégalités sociales de santé, qui se manifestent concrètement par le report de soins ou l’achat d’appareils insuffisamment adaptés."

Pour la personne qui en a besoin, le prix des appareils auditifs représente une part significative de son budget. Les Belges ne sont en général remboursés que pour moins de la moitié du prix qu’ils ont payé pour ce genre d’appareil.

Variation entre provinces
L’analyse des données des membres de la MC montrent que les coûts restant à leur charge sont très variables selon la province où ils résident. Pour un appareil stéréophonique pour les plus de 65ans, on constate que le coût médian varie du simple au double entre Liège et le Brabant flamand, avec plus de 1.000 euros de différence. Seule constante : les personnes résidant en Flandre paient toujours plus qu’en Région wallonne et bruxelloise.
Le coût d’un appareil auditif dépend également de sa complexité technologique. Plus de la moitié des appareils vendus en Flandre sont des appareils caractérisés par les niveaux technologiques les plus élevés. Par contre, en Wallonie et à Bruxelles, ces mêmes appareils représentent seulement 30% du volume de vente. Dans le Hainaut, seuls 22% des appareils vendus sont de catégorie supérieure, contre 54% dans le Brabant flamand. "Difficile dimaginer que tous les patients en Flandre ont des cas de surdité plus accentuée qu’à Bruxelles et en Wallonie. Tout laisse à penser que le prix d’achat d’un appareil auditif, et son niveau de technologie, est probablement plus lié à la capacité d’un patient de payer cet appareil qu’à ses besoins", regrette Elisabeth Degryse.
Pour la MC, les montants des suppléments à charge du patient doivent interpeller les décideurs politiques. "Scinder le coût du matériel des services de laudicien en toute transparence serait un premier pas important, clame Elisabeth Degryse. Détailler avec clarté les différents suppléments serait aussi un gage dhonnêteté. Sans cela, une augmentation du remboursement des appareils auditifs, que ce soit dans l’assurance obligatoire ou complémentaire, engendrerait une augmentation des suppléments. En outre, négocier des tarifs au niveau européen, à l’instar du vaccin contre le Covid-19, serait bénéfique à la baisse des coûts et engendrerait une forme de régulation du marché."