Maladies chroniques

Gros plan sur la maladie d'Alzheimer

5 min.
Région Hainaut oriental

Région Hainaut oriental

"Il y a 170.000 personnes (1) souffrant actuellement de démence en Belgique, commence Grégory Maes, chargé du projet Alzheimer à la Mutualité chrétienne. Et sur ces 170.000 personnes, plus de 85.000 sont atteintes de la maladie d’Alzheimer. C'est la forme la plus courante de démence qui touche majoritairement les plus de 65 ans, mais 2% environ des personnes malades sont plus jeunes."

Pour rappel, la maladie s’attaque à certaines fonctions comme la mémoire, le raisonnement, le langage, le jugement et l’humeur. Plus elle évolue, moins la personne est autonome. Et plus elle a besoin d'aide. "Avec le vieillissement de la population, ces chiffres ne feront que croître à l'avenir pour devenir un véritable problème de société, poursuit Grégory Maes. On évoque le nombre de 250.000 personnes (1) atteintes de démence en 2030. Il devenait donc urgent de structurer un accompagnement, autant dans l'information à apporter que dans les services vers lesquels s'orienter."

Porte unique

La Mutualité chrétienne propose désormais une brochure reprenant tous les services proposés par ses différents partenaires : le Centre de coordination, Aide & soins à domicile, Qualias et Solival, Vitatel, les Solidarités locales. "Le service Alzheimer répit est une nouveauté qui permettra aux familles de souffler quelques temps. Nous avons aussi compilé toute une série d'initiatives extérieures comme celles de la Ligue ou d'Alzheimer Belgique, mais aussi l'ASBL Aidants proches ou les Alzheimer cafés. Enfin, nous avons fait l'inventaire des institutions qui proposent un accueil de jour ou de l'hébergement sur notre région."

En plus de cette information centralisée, la démarche fait l'objet d'une sensibilisation au sein de l'ensemble de la mutualité : les équipes du service social et de Aide & soins à domicile, les bénévoles des mouvements Altéo et Enéo, les comités de mutuelle…

En externe, en plus des différentes initiatives recensées, les médecins généralistes, gériatres, neurologues ont également été contactés afin de les informer de notre démarche.

"Avec cette porte d'entrée unique vers l'information, notre objectif est véritablement de dire que, quand la maladie survient, la mutualité peut vous aider. En franchissant la porte de la mutualité, un conseiller vous accueillera pour vous orienter."


Le tiroir est vide

Grand succès de foule fin mars pour la conférence sur la maladie d’Alzheimer organisée par les comités locaux de Gosselies et Jumet.

"Où ai-je encore mis mes lunettes ? Et mes clés de voiture ? Personne n’a vu mon trousseau de clés ? Et cette voisine croisée en rue ce matin, elle s’appelle comment encore ?"

C’est par ces anecdotes dédramatisantes que le docteur Christophe Dumont, gériatre et coordinateur du programme de soins gériatriques au Grand hôpital de Charleroi, entame son exposé devant une salle comble et attentive. "Si vous vous reconnaissez dans cette situation, rassurez-vous, vous ne souffrez pas pour autant de la maladie d’Alzheimer. C’est simplement l’exemple type de ce que l’on nomme l’oubli bénin."

Utiliser le téléphone, préparer une recette… tout est bon pour maintenir l’autonomie à domicile et le rôle dans la famille.

J'me souviens plus très bien

En effet, inutile de s'inquiéter pour ce genre de petits trous de mémoire occasionnels. Si l’on considère que la mémoire est une armoire avec plusieurs tiroirs, avec le vieillissement, la difficulté est d’ouvrir le bon tiroir où l’information recherchée a été rangée. Avec la maladie d’Alzheimer, le bon tiroir est identifié, mais une fois ouvert, il est vide, l’information s’est envolée. "Il faut distinguer la mémoire récente et la mémoire ancienne, poursuit le docteur Dumont. Le malade se souvient du menu de sa communion, mais pas du repas de midi. Il connaît sa date de naissance, mais ne peut dire son âge."

La perte de mémoire n’est qu’un symptôme de la maladie d'Alzheimer qui s’accompagne progressivement d’une perte d’autonomie. Citons d’autres troubles cognitifs comme l’apraxie, ou l’agnosie : le malade oublie l’utilité d’un objet. Ne reconnaissant plus une fourchette, il préfère manger avec ses doigts. "Le malade peut aussi parfois devenir aphasique. Il perd son vocabulaire et, quand on lui parle, c’est comme s’il entendait un charabia incompréhensible. Comme il ne comprend plus, on répète trois fois la même chose, entraînant un énervement réciproque."

En termes de prévention, les recommandations sont classiques et universelles : une alimentation saine et variée, une activité physique régulière et bien sûr de quoi solliciter le cerveau. "Au rayon curatif, il existe des médicaments qui favorisent les transmissions entre les neurones et d’autres les protégeant. Les deux types peuvent être associés, mais ils ne guérissent pas la maladie. Ils la freinent ou la stabilisent selon les personnes. Mais il ne faut pas espérer récupérer la mémoire."

En parallèle au traitement, une approche psychologique est à encourager. "Cette approche permet de mieux connaître le comportement du malade et par conséquent d’adapter le sien, en évitant de s’énerver inutilement par exemple, que l’on soit un aidant proche de la famille ou personnel soignant en institution."

Pour le Dr Dumont, une prise en charge médicale et pluridisciplinaire est bénéfique pour les patients atteints d’une démence débutante qui vivent toujours chez eux. Avec l’intervention coordonnée d’un ergothérapeute, d’un kiné, d’une assistance sociale… les capacités du malade sont sollicitées. Utiliser le téléphone, préparer une recette… tout est bon pour maintenir l’autonomie à domicile et le rôle dans la famille.

Raz-de-marée

"La maladie d’Alzheimer commence souvent de manière discrète et diffuse, enchaîne Françoise Hucq, assistante sociale à la Mutualité chrétienne. Les premières personnes qui s’inquiètent sont généralement celles de l’entourage proche. Au départ, les petits oublis sont relativisés, on évoque le stress ou la fatigue. Si des changements inattendus et inhabituels se multiplient, alors il est utile d’en parler à son médecin traitant." Celui-ci éliminera d'abord toute autre pathologie pouvant causer les symptômes observés chez la personne, pour éviter l’erreur de diagnostic. Il pourra ensuite conseiller l'envoi chez un neurologue ou un gériatre.

"Quand la maladie d'Alzheimer est identifiée, l'annonce du diagnostic provoque un raz-de-marée émotionnel pour le malade et son entourage. Les proches qui s’occupent au quotidien de personnes atteintes sont souvent des conjoints, âgés eux-mêmes, ou des enfants et, en particulier, des femmes. Ils ont rarement choisi ce rôle en connaissance de cause. Ils l'assument par amour, par sens du devoir, par fidélité ou suite à une promesse de ne 'jamais laisser tomber' l’autre. Au fil du temps, cet accompagnement peut être vécu comme un fardeau et s’accompagner d’un sentiment d’impuissance et de culpabilité à l’idée qu’un jour, il faudra peut-être placer son parent en institution. Les occupations de chacun sont perturbées et des conflits familiaux peuvent surgir, car le rôle de chacun au sein de la famille a changé."

Il faut pouvoir reconnaitre ses limites, ne pas se croire indispensable afin de continuer à aider dans la durée sans s’épuiser. Vivre à domicile avec une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer implique de faire appel à diverses formes de soutien, à demander de l’aide. Il faut réfuter l’idée que rester chez soi, c’est devoir se débrouiller seul ! Cette fausse idée se solde bien souvent par des situations d’urgence avec des prises de décision en catastrophe, voire une entrée en institution non préparée qui peut s’avérer très traumatisante pour tout le monde.

Le nouveau projet de la Mutualité chrétienne constitue désormais un outil précieux dans l'accompagnement des familles du malade d'Alzheimer. Cette première étape sera suivie d'autres initiatives telles que des activités destinées aux personnes malades et leurs proches, un site Internet…

Point Info Malades Chroniques

Consultez de nombreuses informations spécifiques sur www.mc.be/maladie-chronique.

Vous aussi, posez votre question par e-mail à maladie-chronique@mc.be. Précisez vos nom, adresse légale ou numéro de registre national. Un relais vers votre mutualité régionale pourra être organisé si nécessaire.