Editos

Trop de jeunes sous statut BIM

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Elisabeth Degryse

Elisabeth Degryse

37% des Bruxellois de moins de 18 ans sont désormais bénéficiaires de l'intervention majorée (BIM). Il sont 35 % à Charleroi et 40 % à Anvers. Ces chiffres font froid dans le dos, mais ils sont à mettre en parallèle avec le revenu moyen par habitant: il est 21 % plus bas que la moyenne nationale à Bruxelles et 28 % plus bas à Charleroi, selon les statistiques sur les revenus fiscaux de Statbel. Dans les faits, la situation de ces jeunes est héritée des faibles niveaux de revenus de leurs parents: si les premiers bénéficient de l'intervention majorée, c'est bien en raison du faible niveau de revenus de ces derniers. En examinant les données de la MC, il apparaît également que certaines catégories de la population sont davantage susceptibles de bénéficier du statut BIM: les familles monoparentales, les femmes, les invalides, les chômeurs et surtout les plus âgés (+ 65 ans), qui représentent la majeure partie des bénéficiaires de l'intervention majorée. En tout, 19 % de la population belge était BIM en 2021, contre 15 % en 2008. Cette progression justifiait que la MC se penche sur le phénomène.

L'importance du dispositif BIM se révèle une nouvelle fois.

Derrière cette augmentation générale des bénéficiaires de l'intervention majorée, se dessine non seulement une paupérisation progressive de la population, mais aussi des évolutions du point de vue législatif: le droit a été progressivement étendu de sorte qu'aujourd'hui, tous les ménages à faibles revenus peuvent en faire la demande. La mise en place de processus administratifs de plus en plus efficaces pèse aussi dans la balance: le droit a été automatisé pour certaines catégories sociales (pensionnés, titulaires d'une allocation pour personnes handicapées ou d'un revenu d'intégration sociale par exemple) et une détection automatique des potentiels bénéficiaires est mise en œuvre depuis 2015 entre les mutualités, l'Inami et le SPF Finances. 

Un indicateur fiable de pauvreté

C'est plus que jamais essentiel: entre les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19 (dont nous ne pouvons encore mesurer la pleine ampleur) et le conflit en Ukraine, qui a profondément modifié le marché de l'énergie et les prix de plusieurs biens de première nécessité, la précarité se creuse. Et un nombre croissant de ménages se retrouvent, bien malgré eux, en situation de prétendre au statut BIM. 

L'importance du dispositif BIM se révèle une nouvelle fois, car il améliore l’accessibilité financière - entre autres aux soins de santé - pour les familles ayant des revenus limités. Le statut BIM est fiable car il est contrôlé et remis en question quand le statut ou les revenus évoluent. C’est cette fiabilité qui explique que le statut BIM ouvre aussi la voie à d’autres interventions comme le tarif social énergie, le tarif social téléphonique, des réductions de tarif dans les transports publics… 

Cependant, il arrive encore trop souvent que nos membres, qui y ont droit, ne demandent pas à bénéficier du statut BIM. Parfois parce qu’ils n’ont pas de problème de santé, ou parce qu’ils n’y pensent pas, parfois parce que le parcours administratif se révèle trop compliqué ou méconnu des personnes qui répondent aux conditions d'obtention du statut BIM. Or, accompagner tous nos membres et leur donner tous les outils pour améliorer leur qualité de vie est la priorité de la MC.

Ce qui peut être déclenché automatiquement doit l’être.

C’est pour cela que la MC, demande que désormais, pour les personnes isolées et les familles monoparentales, le droit au BIM soit activé plus rapidement en cas d’incapacité de travail, de chômage depuis plus de 3 mois, d’invalidité ou de pension. 

Conçu pour améliorer l’accès financier aux soins, le statut BIM réduit le ticket modérateur du patient. Concrètement, là où un patient non BIM débourse 4 à 6 euros pour une consultation chez son médecin généraliste (selon qu'il dispose d'un dossier médical global ou non), la même visite, pour un bénéficiaire de l'intervention majorée, ne coûtera qu'1 ou 1,5 euro. 

Dans notre pays, il subsiste encore un véritable problème avec la répartition de la richesse créée. Si depuis 2006, notre PIB a augmenté de 84 %, la précarité, notamment des jeunes, ne diminue pas. Lutter contre les inégalités sociales doit aussi passer par une fiscalité plus juste. La protection des plus faibles ne doit plus se cacher derrière des formalités administratives : ce qui peut être déclenché automatiquement doit l’être. La MC militera donc pour que la législation soit adaptée en ce sens.